Intercorporéité Shared embodiment

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Perspectives

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Bibliographie

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Définition

L’intercorporéité désigne la relation qui s’établit entre deux corps, notamment humains, quoique la notion puisse être étendue aux relations humain-animal et humain-objet. Plus spécifiquement, ce terme désigne les phénomènes de continuité, voire de confusion, entre son propre corps et le corps d’autrui.

Pour citer : « Intercorporéité », Performascope : Lexique interdisciplinaire des performances et de la recherche-création, Grenoble : Université Grenoble Alpes, 2021, [en ligne] : http://performascope.univ-grenoble-alpes.fr/fr/detail/177913

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Date de création : 2021-06-14.

Dernière modification : 2022-06-29.

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Bibliographie

« Si en serrant la main de l’autre homme, j’ai l’évidence de son être là, c’est qu’elle se substitue à ma main gauche, que mon corps annexe le corps d’autrui dans cette « sorte de réflexion » dont il est paradoxalement le siège. Mes deux mains sont « comprésentes » ou « coexistent » parce qu’elles sont les mains d’un seul corps : autrui apparaît par extension de cette comprésence, lui et moi sommes comme les organes d’une seule intercorporéité. »

Maurice Merleau-Ponty, Signes, Paris : Gallimard, 1960, p.274


« This intercorporeality simultaneously foregrounds the material and socio-cultural nature of the performing body and the bodily and tangible nature of performing relationships in practice. Part of the relationship is also including non-human physical and artefactual dimensions or as ‘boundary-objects’ that call, afford or disclose co-constitutive meanings and responsive relations of a nexus of “self-other-things” »

Küpers Wendelin, « Critical Performativity and Embodied Performing as materio-socio-cultural Practices – Phenomenological Perspectives on performative Bodies at work », M@n@gement, 20,1, 2017, p.99


« Intercorporeality is constituted through bodily intentionality and corporeal dispositions that acquire an orientational function in the interaction. At the same time, the enabling conditions of bodily action are mediated with the normativity of presymbolic relations of cooperation. Without the social dimension of reciprocal expectations, this intercorporeality would merely be an impressionistic structure. »

Jens Loenhoff, « Intercorporeality as a Foundational Dimension of Human Communication», in Intercorporeality. Emerging Socialities in Interaction, Christian Meyer, Jürgen Streeck, J. Scott Jordan dirs.., Oxford : Oxford University Press, 2017, p.35

Installation et performance
Rachel Gomme, Artiste-chercheuse et performeuse indépendante, Londres, Royaume-Uni

Corps-partage

Langue. Hanches. Foie. Cellule.

Respirer. Pisser. Pleurer. Dormir.

En-corps en commun. Nous sommes tout.e.s. Nous ne nous connaissons que en tant que. Nous ne pouvons pas être sans.

Premier partage :

C’est par là que je me connais. C’est par là que je te reconnais. C’est par là que nous parvenons à dire « nous ». Une forme en commun (plus ou moins). Des processus, des mouvements que nous comprenons ensemble. Bouche, langue, oreilles, mains qui forment un langage, des messages d’un côté puis de l’autre. Je suis moi et tu es toi et nous sommes du même (plus ou moins).

Deuxième partage :

Je suis moi et tu es toi et tu es moi et je suis nous. Mon corps ne se termine pas à ma peau. Mon corps est ma respiration, la résonance magnétique de mon cœur, les phéromones que je dégage et que tu reçois, que tu le veuilles ou non. J’inspire ton haleine, mes rythmes menstruels s’harmonisent avec les siens, je résonne avec leurs vibrations. Les corps ensemble corpent ensemble.

Troisième partage :

Je suis une et je suis multitude. Je saisis mon moi comme un soi, mais il y a beaucoup de sois dedans et sur ce soi. Ils sont eux et ils sont aussi moi. Des trillions de bactéries sont « moi ». Des multitudes d’organismes qui s’entr’organisent par travers mes organes. Nous partageons ce corps-forme, nous le formons ensemble.

Quatrième partage :

Il y a d’autres corps qui ne sont pas les mêmes. Pour autant, je les appréhende comme du même. Avec certains je partage courir, rouler, dormir, manger par la bouche, respirer par des poumons. D’autres sont plus étranges, mais toujours de cette même vivance. Nous tous, cellules qui respirent, qui absorbent et dégagent, se multiplient et meurent en cycles cyclants.

Cinquième partage :

Relations de temps et d’espace et de gravité. Je suis matière dans un monde-matière, un univers de sauts, de vibrations, de particules qui sont et ne sont pas, passant les uns par travers les autres. Je suis une constellation changeante dans un flux-chaos de changement. Les corps se composent de poussière d’étoiles lointaines, mais les étoiles sont également, en ce moment même, notre corps.

Ce corps-esprit, en ce moment :

Je suis créatrice-chercheuse en mouvement et en performance. Dans mon activité artistique comme dans ma recherche scientifique, je m’ouvre à la question de ce que c’est d’être présent.e, comment corps (humain) et environnement/autre se rencontrent et s’entrelacent, et comment les corps se rejoignent dans la performance, surtout la performance en situ et/ou participative.

Pour prolonger :

Deleuze, Gilles and Félix Guattari, Mille Plateaux (Paris, Les Éditions de Minuit, 1980)

Ingold, Tim, The Perception of the Environment: Essays on Livelihood, Dwelling and Skill (London, Routledge, 2000)

Ingold, Tim, Being Alive: Essays on Movement, Knowledge and Description (London, Routledge, 2011)

Sheets-Johnstone, Maxine, The Primacy of Movement (expanded second edition) (Amsterdam, John Benjamins Publishing Company, 2011)

Pour citer : Rachel Gomme, « Intercorporéité », Performascope : Lexique interdisciplinaire des performances et de la recherche-création, Grenoble : Université Grenoble Alpes, 2021, [en ligne] : http://performascope.univ-grenoble-alpes.fr/fr/detail/177913

Elizabeth A. Behnke, « Interkinesthetic affectivity : A phenomenological approach », Continental Philosophy Review, 2, 41, 2008, pp.143-161

Tim Ingold, Being Alive: Essays on Movement, Knowledge and Description, Londres : Routledge, 2011

Christian Meyer, Jürgen Streeck, J. Scott Jordan, dirs., Intercorporeality. Emerging Socialities in Interaction, Oxford: Oxford University Press, 2017

Maxine Sheets-Johnstone, The Primacy of Movement (expanded second edition), Amsterdam : John Benjamins Publishing Company, 2011